Jeux en ligne 1er bilan, clause de revoyure

Table ronde 2

La clause de revoyure : quelles attentes ?

PRESIDENT :

Jean ARTHUIS, ancien ministre, sénateur de la Mayenne, président de la commission des finances

PARTICIPANTS :

Xavier HÃœRSTEL, directeur général délégué du PMU
Emmanuel de ROHAN-CHABOT, directeur général de ZEturf
Georges TRANCHANT, président et fondateur du groupe Tranchant
Gilbert YSERN, directeur général de la Fédération Française de Tennis

I. Introduction

Jean ARTHUIS

Je suis heureux de vous rejoindre pour ce colloque organisé par Jean-François Lamour et François Trucy. Il s’agit d’une heureuse initiative dont je tiens à les remercier. La commission des finances du Sénat avait eu le privilège d’entendre Monsieur Vilotte, président de l’ARJEL, le 2 mars dernier. Le bilan qu’il avait dressé à cette occasion est plutôt positif, au regard notamment de l’ordre public. Sur le plan économique, les avis sont plus partagés.

Nous devons maintenant évoquer l’article 69 de la loi, qui régule la concurrence et l’ouverture des jeux en ligne. Il dispose que, dans un délai de dix-huit mois à compter de la date d’entrée en vigueur de la loi, un rapport est adressé par le gouvernement au Parlement, proposant le cas échéant des adaptations nécessaires du texte de loi.

Nous avions trois bonnes raisons de prévoir cette clause de revoyure. En premier lieu, cette démarche tend à se généraliser. La réforme constitutionnelle de juillet 2008 a prévu qu’une étude d’impact soit effectuée pour toute législation. Il existe également des initiatives parlementaires sous forme de rapports, un an après l’adoption de lois. Enfin, nous avons déjà appliqué cette démarche concernant la loi portant réforme de la taxe professionnelle. Pour le reste, l’Assemblée nationale et le Sénat effectuent leur propre travail d’élaboration.

En deuxième lieu, cette loi a constitué une sorte de saut dans l’inconnu. Malgré les nombreux garde-fous qu’elle prévoyait (obligation de prévoir des modérateurs de jeux, correspondants fiscaux en France, etc.), des incertitudes et des aléas demeuraient quant à la capacité de rentabiliser l’activité, les effets réels sur l’addiction, ou les moyens de lutte contre les sites illégaux. Enfin, la loi se voulait équilibrée mais constitue, pour certains acteurs, une ouverture a minima, trop stricte en termes de champ.

Parmi les domaines qui devront être prioritairement abordés dans le cadre de la clause de revoyure figurent, me semble-t-il :

 le modèle économique des jeux en ligne et les intérêts financiers des acteurs ;
 l’efficacité de la préservation de la sécurité et de l’ordre public (lutte contre le blanchiment, respect des interdictions faites aux opérateurs non agréés, conflits éventuels dans le cadre du sponsoring) ;
 des questions de santé publique (niveau réel de dépendance, respect des autolimitations, respect de la pause imposée lors des tournois de poker en ligne, etc.).

Que faut-il attendre du bilan qui sera dressé ? Nous ne devons certainement pas attendre une nouvelle loi à court terme, car l’agenda parlementaire et politique est peu propice à moins d’un an des élections présidentielles. La démocratie et la loi s’inscrivent dans la durée. Du point de vue de l’intérêt général, il n’existe pas d’urgence manifeste.

En outre, un délai de réflexion, d’arbitrage et de mise en forme est nécessaire avant toute modification juridique de la loi, compte tenu de l’importance de ses impacts. Le ministre François Baroin a écarté toute révision de la législation avant la fin de la présente mandature. De ce fait, le travail d’évaluation, dans le cadre de la clause de revoyure, doit respecter six principes :

 ne pas faire preuve d’excès de moralisme concernant l’activité des jeux mais de l’impartialité, du pragmatisme et de l’indépendance ;
 respecter l’esprit de la loi, autour de l’équilibre entre le jeu comme loisir et la préservation de l’ordre public et social ;
 organiser une équité concurrentielle entre les opérateurs historiques et les nouveaux entrants qui " jouent le jeu " ;
 préserver les recettes fiscales ;
 reconnaître et conforter les filières, les organisateurs et les compétiteurs ;
 garder à l’esprit la vocation d’exemplarité du cadre français.

II. Débat

Gilbert YSERN

En ce qui concerne le mouvement sportif français, le premier bilan de la loi, qui offre un cadre régulé pour les paris sportifs, est positif. La loi a limité les paris illégaux et a continué de donner des moyens au sport français, au travers notamment du CMDS. Elle a reconnu des droits aux organisateurs, ce qui nous donne des moyens pour préserver l’intégrité du sport. Elle nous a donné la possibilité, collectivement, d’essayer de comprendre cette activité complexe que constituent les paris sportifs et le jeu en ligne. Enfin, la loi nous a incités à échanger avec d’autres opérateurs, ce qui constitue une autre de ses vertus. Les relations avec les opérateurs sont assez bonnes aujourd’hui et les contrats que nous avons conclus sont équilibrés. Ils ont été librement négociés et contiennent des avancées consenties par les deux parties.

Le droit de propriété, reconnu par la Cour d’appel de Paris en 2009 puis par la loi de 2010, constitue à nos yeux la clé de voûte du dispositif législatif.
Christophe Blanchard-Dignac, président de la Française des Jeux, rappelait que ce droit était légitimé par les investissements que doivent consentir les fédérations pour mettre en place des dispositifs de contrôle et de surveillance, notamment. Il s’agit aussi de la reconnaissance du droit à l’autorisation d’exploiter les compétitions sportives. Un long débat a eu lieu autour de l’article 63 de la loi et nous sommes finalement arrivés à un montant proche de 1 % des mises. J’espère que ce montant ne sera pas tenu pour responsable des difficultés d’un modèle économique critiqué par les opérateurs.

Notre obsession est la lutte contre la corruption, car en l’absence d’événement sportif crédible, il n’existe plus de sport. Nous sommes donc extrêmement attachés à la préservation de l’intégrité du sport. Celui-ci est en danger. Dans le domaine du tennis, nous avons pris une certaine avance avec la création de la Tennis Integrity Unit (TIU), qui dispose de moyens d’investigation, de prévention et de formation. Récemment, un questionnaire en ligne a été élaboré à l’intention de l’ensemble des joueurs professionnels ; à l’occasion d’événements tels que Roland-Garros, nous mettons notamment en place des dispositifs spécifiques de monitoring des cotes. L’ARJEL a suivi les recommandations du mouvement sportif français en limitant le champ des paris sportifs. Nous avons considéré que trois conditions devaient être réunies pour assurer un minimum de précautions :

 l’existence d’un enjeu sportif ;
 l’existence d’un enjeu économique ;
 l’existence d’un enjeu médiatique.

Il nous semble important que ce champ ne soit pas plus largement ouvert afin que seules des épreuves majeures soient offertes aux paris.

Enfin, le mouvement sportif français a initié, il y a quelques semaines, une réflexion partagée au travers d’une étude qui vise, sous l’égide du CNSOF, à préciser les possibilités de mise en place de dispositifs spécifiques qui auraient pour objet de préserver nos sports.

En 2010, les redevances apportées par les paris sportifs (environ 50 000 euros) ont été loin de couvrir nos frais (qui ont atteint environ 150 000 euros pour l’organisation des compétitions concernées). Ceci ne nous émeut guère, car l’objectif premier de la loi n’est pas celui de la rentabilité. Nous avons encore beaucoup de chemin à faire si nous voulons éviter que le sport ne soit mis en danger au cours des années qui viennent.

Xavier HURSTEL

La loi visait avant tout à réguler un marché qui était déjà largement ouvert, afin que s’y développe une concurrence équitable. Nouvel entrant en matière de poker et de paris sportifs, le PMU tire, à ce stade, un bilan positif de la loi, qui a permis de lutter avec succès contre l’offre illégale. La prise d’une part de marché de 20 % par nos concurrents, concernant les paris hippiques sur Internet, montre que la concurrence a fonctionné. La loi avait également pour objectif d’améliorer la lutte contre le jeu illégal et de vendre le modèle français de retour au sport, basé sur le modèle qui a permis de développer, en France, une des filières hippiques les plus solides au regard de l’expérience d’autres pays où que ce soit dans le monde.

Plusieurs intervenants ont déjà rappelé qu’une partie du marché – les paris sportifs – était " déceptive " : ces paris ne sont pas aussi importants que ce que nous avions initialement escompté. Nous pensons qu’il serait utile de prendre dans ce domaine une mesure consistant à ouvrir l’offre légale de sport sur ce segment. Je partage le constat dressé par Monsieur Ysern : il faut avant tout examiner l’enjeu sportif d’un événement, voire son enjeu médiatique, afin de s’assurer que la fraude sera marginale ou inexistante. Nous avons l’habitude de travailler avec le monde des courses, particulièrement régulé depuis longtemps, dans la mesure où il constitue le support de paris, et il me semble que de nombreux sports pourraient s’inspirer de ce secteur.

Pour de grands matchs, nous n’avons pas pu offrir des paris dans la mesure où il s’agissait de matchs amicaux, dépourvus, à ce titre, d’enjeu sportif. Il nous semble que cette règle pourrait souffrir des exceptions et nous souhaitons que ce débat soit ouvert. Je citerai pour exemple le match France-Brésil qui a eu lieu il y a quelques semaines. Ce match aurait pu, à nos yeux, constituer le support de paris.

Par ailleurs, force est de constater que le pari à handicap – qui n’est pas autorisé sur le web – est le plus intéressant. Nous estimons que nous pourrions proposer de tels paris tout en respectant la déontologie du sport.

Le plafonnement du TRP, introduit par la loi, ne nous paraît pas poser un réel problème car les opérateurs conservent une certaine marge de ce point de vue.

Enfin, le montant très élevé des dépenses publicitaires et de marketing consenties au moment de l’ouverture à la concurrence a impacté nos comptes. Nous estimons que le retour de ces dépenses à des niveaux nettement plus faibles devrait contribuer à un équilibre financier plus satisfaisant pour les opérateurs.

Pour le reste, la clause de revoyure devrait permettre d’améliorer les règles du pari mutuel, qui nécessite, davantage que le pari à cote fixe, une réglementation précise. Nous estimons qu’à ce stade, il n’existe pas de cadre juridique précisant clairement les obligations faites aux opérateurs de paris mutuels. Sans doute les décrets peuvent-ils apporter une amélioration de ce point de vue.

L’ARJEL a remporté de beaux succès en matière de lutte contre les sites illégaux. Il faut poursuivre cette lutte, en particulier vis-à-vis de sites qui continueraient à proposer des jeux à des parieurs français. Il faut absolument que ces " fuites " soient rendues impossibles afin de restaurer un marché économique viable pour le pari sportif. Enfin, reconnaissons que les contraintes administratives imposées par l’ARJEL sont lourdes. Toutes les mesures qui permettront de " fluidifier " le parcours du client seront les bienvenues.

Georges TRANCHANT

Jusqu’à la fin de l’année 2010, nos recettes ont continué de diminuer, malgré une légère reprise depuis le mois de janvier 2011. Il convient de reconnaître que l’ARJEL a produit des efforts considérables afin d’ouvrir les jeux en ligne suffisamment tôt pour la Coupe du monde de football. Notre profession n’a pas, aujourd’hui, le recul nécessaire pour se faire une idée des synergies susceptibles d’exister entre le poker en ligne et le poker qui peut être pratiqué dans nos établissements.
Selon les chiffres de l’ARJEL, l’exploitation du poker en ligne a généré en six mois 161 millions d’euros de produits de jeux, auxquels s’ajoutent 412 millions d’euros de droits d’entrée aux tournois, soit quatre fois plus que les casinos en dur en un an. Le poker en ligne produit donc davantage de gains que le poker en dur proposé par nos établissements. Un site en ligne n’est pas limité en nombre de joueurs : il peut en accueillir des centaines sans difficulté. Il n’en est pas de même dans nos établissements : lorsque nous avons un afflux de joueurs de poker, nous sommes contraints par notre autorisation de jeu, qui porte sur un nombre déterminé de tables. Nos confrères, eux, ne rencontrent aucune difficulté pour adapter leurs offres, même diversifiées, aux demandes des joueurs. Il existe là une iniquité pénalisante pour l’activité de nos casinos. De même, les listes de joueurs interdits ne sont pas réparties dans les autres pôles de jeux, qu’il s’agisse de la Française des Jeux ou du PMU, alors que nous sommes soumis à une très stricte réglementation dans ce domaine.

La seule possibilité de développement, pour les casinos français, consisterait à se voir reconnaître l’exclusivité de l’organisation de jeux de casino en ligne. Les clients connaissent en effet le sérieux des casinos en dur, où existe un préposé à la lutte contre l’addiction. Nos clients nous font confiance et souhaiteraient pouvoir jouer via Internet dans leur casino à des jeux de type roulette, black jack, ou machines à sous. Pour le reste, certains exemples européens nous semblent intéressants. Il demeure par exemple un monopole des jeux en dur aux Pays-Bas. La Belgique, quant à elle, a donné aux casinos en dur l’exclusivité des jeux en ligne de casino.

Nous ne pouvons que nous réjouir de la mise en place très récente du comité consultatif des jeux, présidé par François Trucy, qui est sans doute l’un des meilleurs connaisseurs du secteur. Nous considérons qu’avec cet encadrement, dans lequel Jean-François Lamour prend également une place éminente, nous serons en mesure de faire entendre notre voix auprès de la Commission européenne et des autorités de régulation européenne.

Emmanuel de ROHAN CHABOT

L’exercice qui nous est proposé aujourd’hui est difficile, car il s’agit en quelque sorte de présenter le cahier de doléances des " affreux " ; je salue donc la volonté de Monsieur Arthuis de ne pas placer ce débat sur le terrain de la moralité. Trois points m’intéressent particulièrement en ce qui concerne la clause de revoyure.

Il s’agit en premier lieu de replacer le joueur – et non le joueur victime d’addiction, qui reste statistiquement minoritaire – au cÅ“ur de ce débat. Dans le cas de ZEturf, les joueurs à problème représentent 1 % ou 1,5 % de la population. De ce point de vue, la réglementation a été bien faite, avec différents outils tels que l’interdiction d’accès au jeu. Toujours est-il que nous devrions aujourd’hui recentrer le débat sur le joueur " normal ", d’autant plus que la loi est supposée profiter au consommateur. En l’état, la loi pénalise lourdement le consommateur, par rapport à la situation antérieure. A une certaine époque, le taux de distribution s’élevait à près de 95 % : pour 1 euro de dépôt, le joueur parvenait à jouer 8 euros ; son action de jeu lui coûtait 12 centimes, contre 33 centimes aujourd’hui. Le premier effet de la loi sur le consommateur fut donc de multiplier le prix du produit. Or, seuls les joueurs sont aujourd’hui inclus dans l’assiette de la fiscalité. Peut-être un changement de conception pourrait-il être proposé de ce point de vue. La lutte contre l’addiction consiste à empêcher les joueurs de dépenser trop et non à les empêcher de jouer.

Une autre conséquence de ces dispositions réside dans la disparition des " gros " joueurs. Peut-être sont-ils partis vers un " ailleurs " indéfinissable. L’étanchéité des systèmes ne peut être garantie que sous un certain différentiel de pression. Avec un rapport de un à trois dans l’évolution du prix du produit, cette étanchéité ne peut évidemment être garantie. Enfin, il serait souhaitable qu’une offre plus variée soit proposée aux joueurs. Rappelons que la définition des événements sportifs éligibles aux paris est établie par l’ARJEL.

Je souhaiterais que la clause de revoyure fournisse l’occasion d’établir une véritable concurrence. Nous avons indiscutablement bénéficié de conditions fiscales très favorables. Aujourd’hui, les choses se sont radicalement inversées : il est frappant de constater que le PMU " en dur " est soumis à une fiscalité de 6,4 % sur les enjeux, alors que les opérateurs de paris sur Internet sont soumis à une fiscalité de 14,4 %. Il s’agit certes d’une mesure transitoire mais celle-ci est lourde de conséquences. L’Autorité de la concurrence a également mis en évidence un certain nombre de distorsions de concurrence et la nécessité de scinder les masses – voire les marques –, en dissociant les paris en ligne et les paris en dur. Cela dit, attaquer le PMU revient à entrer en guerre avec les opérateurs avec lesquels nous sommes censés nous entendre à long terme. N’appartient-il pas à la puissance publique de faire respecter un certain nombre de principes en matière de concurrence ?

Enfin, nous avons une doléance en matière fiscale. Pour améliorer l’offre, sans doute faudrait-il améliorer le taux de retour aux joueurs. Peut-être notre marge pourra-t-elle passer de 0,6 % à 0,3 % mais je doute qu’une telle évolution soit très sensible pour les joueurs. Il existait auparavant un critère économique basé sur la rapidité de circulation du jeu. Incontestablement, les recettes de l’Etat, de même que celles de la filière, doivent être préservées. La fiscalité du PMU a beaucoup diminué, et l’ouverture a fait ressortir un constat dont de nombreux acteurs étaient conscients : le développement des jeux en ligne n’a pas eu lieu au détriment des paris en dur. Le risque est aujourd’hui de revenir à une situation de monopole de fait, qui aurait pour conséquence d’assurer aux joueurs un taux de retour plus satisfaisant en matière de paris sportifs, ce qui se traduirait une nouvelle fois par une distorsion préjudiciable.

Jean-François VILOTTE

Un point, au moins, ne figure plus dans la clause de revoyure alors qu’il faisait précédemment l’objet de débats : la nécessité de la régulation elle-même. S’agissant d’objectifs d’ordre public et d’ordre social, la régulation a bien pour objectif de protéger le consommateur contre un certain nombre de risques. Cette question étant traitée, la revoyure peut se concentrer sur les modalités de la régulation, ce qui constitue un progrès important.

En l’absence de régulation, le secteur des paris hippiques et sportifs court un certain nombre de risques systémiques, à commencer par la mise en danger de la filière elle-même ou la perte d’intérêt des compétitions sportives.

L’ARJEL s’est organisée dans la perspective de la clause de revoyure en créant trois commissions spécialisées sur les sujets suivants :

 les effets de l’ouverture sur la demande ;
 les effets de l’ouverture sur la filière ;
 l’efficacité des procédures de régulation.

Il nous semble que cinq sujets doivent être abordés à l’occasion de la revoyure :

 l’attractivité des sites
L’attractivité des sites doit être préservée de sorte que la " bonne monnaie " chasse la mauvaise. Je ne suis pas certain que les paris à handicap constituent une bonne chose pour le sport. Il se pose là un problème d’éthique sportive ; la possibilité de paris combinés sur un différentiel de points me paraît une réponse plus adaptée.
 La question de l’éthique
Chantal Jouanno rendra public demain un rapport que je lui ai remis la semaine dernière, contenant une dizaine de propositions visant la préservation de l’éthique du sport au plan national et international. Le droit au pari constitue par ailleurs un instrument extrêmement vertueux sur le plan économique et sur celui de la prévention des risques. Je partage la réponse apportée par Christophe Blanchard-Dignac concernant la territorialité de ce droit : elle ne peut s’appliquer qu’aux manifestations organisées en France, avec toutefois dans son assiette les paris organisés à l’étranger à propos des manifestations ayant lieu en France.
 La lutte contre l’addiction
Il faut mettre à profit l’expérience acquise depuis une dizaine de mois, notamment du point de vue du suivi de l’activité consolidée des joueurs. Il faut également évaluer les effets de la collaboration qui se noue entre les opérateurs et TRACFIN en matière de lutte contre le blanchiment.
 La lutte contre les sites illégaux
 La question de la lutte contre les sites illégaux est essentielle à nos yeux. L’existence d’une offre légale a permis à la demande de basculer vers cette offre légale. Les moyens de lutte et les procédures civiles ont joué un rôle dissuasif important vis-à-vis d’un certain nombre de sites. Il faut maintenant veiller à la juste articulation des procédures civiles ou administratives avec les procédures pénales, car nous risquons d’être confrontés à des comportements plus nettement intentionnels au regard des infractions à la législation sur les jeux en ligne.
 Les retours vers les filières
 Il me paraît indispensable de donner une assise juridique aux retours vers la filière hippique, de même qu’il est indispensable de défendre les retours vers la filière sportive.

III. Débat avec la salle

Yves DE BEAUREGARD, société Comtrade

Les jeux en ligne de casino pourraient-ils être ouverts à l’occasion de la clause de revoyure ?

François TRUCY

La question sera posée. Il est trop tôt pour y répondre.

Maxime LEPRETRE

J’ai été invité par Monsieur Trucy pour représenter ici les joueurs. Il existe une grande incompréhension, par les parieurs sportifs, du pari à handicap qui était le plus pratiqué avant l’ouverture du marché et qui est aujourd’hui interdit. Cette forme de pari est aujourd’hui autorisée dans le réseau en dur de la Française des Jeux. N’y a-t-il pas là une forme de concurrence déloyale ? Il me paraît en tout cas acquis que le marché des paris sportifs ne décollera pas si les paris à handicap ne sont pas autorisés en ligne.

Christophe BLANCHARD-DIGNAC

L’offre en dur n’est pas identique à l’offre en ligne. Elle représente quelques centaines de paris par semaine, contre plusieurs milliers pour les paris en ligne. En outre, le " live betting " n’est pas autorisé pour la Française des Jeux. Certes, le pari à handicap peut apparaître comme le seul moyen d’équilibrer certaines rencontres – même si le récent match France-Italie, en rugby, nous rappelle que des surprises demeurent toujours possibles. L’instauration d’un comité consultatif des jeux au travers duquel tous les opérateurs seront confrontés à une vision cohérente permettra sans doute de poser ces questions.

Jean-François VILOTTE

Nous avons interdit le pari à handicap pour une raison simple que j’ai rappelée précédemment : il ne faut pas proclamer un résultat qui ne soit pas celui de la compétition. Cela n’empêche pas de combiner un pari sur la victoire d’une équipe et un pari sur le différentiel de points.

Jean-François COT, délégué général du syndicat professionnel des Casinos de France

Au moment des débats qui ont eu lieu au Sénat, je crois que vous aviez vous-même considéré, Monsieur Arthuis, que la pratique des bonus constituait une incitation au jeu. Cette question sera-t-elle revue dans le cadre de la clause de revoyure ?

Jean ARTHUIS

Il est vrai que j’ai été amené à formuler des réserves quant à cette pratique. Sans doute faudra-t-il procéder à son évaluation.

Jean-François VILOTTE

Je signale que l’autorité de régulation entend se prononcer en ce qui concerne les bonus liés au poker. Le problème se pose dans des conditions différentes en ce qui concerne l’hippisme et les paris sportifs, puisque les bonus sont intégrés au gain et font l’objet d’une forme de plafonnement de facto.

François FORCIOLI-CONTI, président de la société des courses de Cagnes-sur-Mer

La transparence pourrait être singulièrement améliorée, dans le cadre de la revoyure, en matière de flux financiers. A titre d’illustration, la Société des courses de Cagnes-sur-Mer est à ce jour dans l’ignorance totale du montant total joué lors de la réunion du mois de juillet dernier sur l’hippodrome de Cagnes-sur-Mer. Nous sommes donc dans l’impossibilité de gérer nos sociétés, faute de recevoir cette information de l’ARJEL.

Jean-François VILOTTE

Il se trouve que le législateur n’a pas créé, dans la loi de mai 2010, un droit d’exploitation aux sociétés de courses. Par voie de conséquence, les informations dont nous disposons sont couvertes par le secret des affaires.

Emmanuel de ROHAN CHABOT

Depuis quelques jours, nous transmettons de façon hebdomadaire aux sociétés de courses les montants des enjeux que nous enregistrons sur les réunions françaises et étrangères. Je serai ravi de vous ajouter à la liste de diffusion en ce qui concerne les courses de Cagnes-sur Mer.

Georges TRANCHANT

Il me paraît normal que l’exploitant d’un grand hippodrome, nécessitant des investissements et de la publicité, puisse se baser sur des prévisions de gains au titre des jeux pour établir son budget. Peut-être un consensus pourrait-il se dessiner parmi les opérateurs afin que les informations relatives à chaque opérateur lui soient accessibles.

Natasha TARDIF, avocate

Comment l’ARJEL justifie-t-elle sa compétence concernant des jeux en ligne qui ne sont pas couverts par la loi de 2010 et pour lesquelles elle n’est donc pas compétente ?

Jean-François VILOTTE

Il appartient au législateur de définir le champ de compétences de l’ARJEL. Ce champ inclut aujourd’hui les paris hippiques, les paris sportifs et les jeux de cercle tels que définis par un arrêté du ministère de l’Intérieur. Nous en prenons acte et régulons ces secteurs.

Natasha TARDIF, avocate

A partir de quand un site est-il déclaré illégal et quel est le champ de compétences de l’ARJEL dans le cas de sites ayant une adresse en " .com " ou un nom de domaine relevant d’un pays distinct de la France ?

Jean-François VILOTTE

Il ne suffit pas, en effet, de constater qu’il existe un site en " .com ". Le site doit permettre à des joueurs français de jouer. Notre démarche consiste donc plutôt à réunir un faisceau d’indices.

Christophe TAIERTZ, Les Echos

Nous voyons se dessiner plusieurs points de consensus, par exemple en ce qui concerne le modèle économique et l’élargissement de l’offre. Cela dit, nous savons que la modification de ces dispositions ne pourra avoir lieu qu’après l’élection présidentielle de 2012. Quel est, dès lors, l’intérêt de ce débat ?

Jean-François VILOTTE

Il existe plusieurs sujets de revoyure. Certains sont de nature réglementaire et ont trait aux normes de l’ARJEL. D’autres pourraient être de nature législative ou de nature fiscale. Chacun de ces sujets peut faire l’objet d’un calendrier différent.